POTOSI
Mai 2002
Les premiers jours a Potosi sont rudes pour les 10 lascards qui font route avec moi, et je n'echappe pas a la regle : nous avions oublie les regles alimentaires elementaires lorsque l'on bascule a nouveau dans le tiers monde. Oublie de ne pas prendre de glacons dans son verre, oublie de peler les pommes, oublie de ne pas boire de soupe si l'eau n'est pas bouillie, oublie encore de troquer les salades contre de gros Big Macs bien graisseux. Au Chili et en Argentine, ces regles de prudence evidentes ne s'imposaient pas, et l'habitude s'est perdue.
Mais le souvenir revient vite, surtout lorsque la moitie du groupe est prise de violentes crampes d'estomac dans le bus et qu'il faut s'arreter en urgence, que l'unique toilette de la guest house est pris d'assaut 24h/24, et que le traffic d'immodium fait rage.
Nous mettons quelques jours a nous retablir, mais les maux d'estomac sont bientot talonnes par les maux de tete, releve due a l'altitude (4100 metres) et a la pollution de la ville, auxquelles nous ne nous faisons decidement pas.
Potosi est belle, pourtant, contrairement a l'image que je m'en faisait. C'est une ville toute en pente, des rues pavees inclinees a 30 degres, d'anciennes maisons coloniales bariolees, une profusion d'eglises en vieilles pierres, qui paraissent baties a la mode bretonne.
C'est la ville la plus antique de Bolivie, creee au 16 eme siecle a la decouverte du Cerro Rico (colline riche) exploite jusqu'a la moelle pour ses mines d'argent. La ville s'appelait "Villa Imperial de Charles Quint" a cette epoque, en hommage au roi d'espagne qui ratissait la majorite des pepites pour huiler ses carosses.
L'argent est le nerf de la guerre, il fit de Potosi une des villes les plus riches du continent, voire du monde, au 17 eme siecle. Plus de 80 eglises furent construites a cette epoque, de marbre et d'argent, il suffisait de se baisser pour trouver le materiau de construction le plus noble, et puis bien sur, les espagnols recouvraient leurs pillages du voile de l'evangelisation. Plutot que de rendre justice aux droits des indigenes, ils sauvaient au moins leur ame!
L'une des plus belles eglises est maintenant une espece de theatre-restaurant, ou nous avons passe une soiree a celebrer notre resurection stomacale a coup de bieres et de hamburgers, sacrilege! Elle fut convertie en theatre en 1825, annee de l'independance nationale, lorsque Simon Bolivar et sa troupe d'independantistes deciderent de mettre fin au regne de la faussete catholique imposee par les colonisateurs. Beaucoup d'autres eglises subirent le meme sort, le couvent fut transforme en ecole primaire, et la cathedrale devint bureau de poste.
La fameuse eglise ou la biere coule a flots s'escalade comme la cathedrale de Strasbourg, et apres plusieurs escaliers en colimacons nous decouvrons une vue imprenable sur Potosi, sur le cerro et les 25 clochers. Notre garcon s'improvise aussi guide, il nous fait decouvrir tous les batiments de la ville vue du ciel, et le hasard veut que nous surmontions les clochers au moment meme du coucher de soleil, dont les derniers rayons filtrent a travers les vitraux vermeilles.
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